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Et si l’on pouvait voyager à l’autre bout de la planète sans monter dans un avion ni passer des semaines dans un train ? Ça n’a rien de futuriste : il n’y a qu’à aller au supermarché du coin. Pendant notre aventure en stop à sillonner les routes de France, on a fait quelques milliers de kilomètres en 3 mois. Mais nos aliments, eux, peuvent faire des milliers de kilomètres en seulement 3 jours. La plupart du temps, ils sont transportés en bateau, mais aussi très souvent en camion et, bien plus rarement, en avion. Si je vous dis tout ça, vous vous en doutez, c’est parce que ce n’est pas sans conséquences pour l’océan.
Le problème
🌡 L’empreinte carbone
En fonction du nombre de kilomètres parcourus par nos aliments, l’empreinte carbone des transports représente une part plus ou moins importante de l’empreinte carbone totale. On parle beaucoup du transport aérien et routier, mais il faut savoir qu’aujourd’hui, 90% du fret mondial est transporté par bateau. La bonne nouvelle pour le climat, c’est que le chargement d’un seul bateau représenterait 60 camions sur les routes. Comme on met beaucoup de marchandises dans un bateau, l’empreinte carbone ramenée à la tonne de marchandises est assez basse. Résultat ? 10 000 km en cargo émettent autant de CO2 que 1 000 km en camion. Mais le problème, c’est qu’il n’y a pas que les émissions de gaz à effet de serre qui impactent l’océan.
🔉 La pollution sonore
L’ouïe sous l’eau est aussi importante que la vue sur terre. Les animaux se basent sur les sons pour survivre et mener à bien leurs fonctions vitales : communiquer, se diriger, trouver des proies, éviter les prédateurs, se reproduire… Mais depuis plusieurs dizaines d’années, les activités humaines, et notamment le transport maritime, ont créé un brouillard acoustique ambiant nocif pour la vie sous-marine. Quand on sait que le bruit se propage 5 fois plus rapidement dans l’eau que sur terre, on comprend qu’il est urgent de limiter la pollution sonore sous-marine si l’on ne veut pas condamner l’ensemble des cétacés.
🐋 Les collisions avec les mammifères marins
Le nombre de navires et la vitesse à laquelle ils sont capables de naviguer augmentent d’année en année, ce qui implique un risque accru de collisions avec les mammifères marins qui vivent dans l’océan. Même s’il est difficile de les estimer car les collisions avec les grands navires passent souvent inaperçues et ne sont pas déclarées, les collisions sont une réalité qui menacent la vie de plus en plus de mammifères marins.
🚢 Les pertes de conteneurs
Sur les cargos géants qui transportent nos marchandises d’un bout à l’autre du monde, il y a les fameux conteneurs. Il arrive régulièrement que ces conteneurs soient perdus et déversent leur contenu dans le grand bleu. Selon Christine Cabau, membre de l’état-major de la compagnie française CMA CGM, sur les 226 millions de conteneurs qui transitent chaque année, les pertes restent marginales. C’est vrai, mais quand il y en a, et il y en a de plus en plus souvent, elles sont impressionnantes et peuvent détruire des écosystèmes entiers.
🐡 Les espèces invasives
Le transport maritime peut être vecteur d’espèces invasives. Il s’agit d’espèces qui sont introduites à un endroit donné par l’action humaine et qui prolifèrent de manière incontrôlée jusqu’à menacer l’équilibre de l’écosystème. Elles sont transportées dans les eaux de ballast, qui permettent d’équilibrer les cargos une fois les conteneurs déposés, ou sur les coques des navires.
Les solutions
⛵️ Le transport à la voile
En 2020, le transport maritime représentait 3% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. C’est certes l’un des moins carbonés, mais il y a quand même encore des efforts à faire. Pour limiter leur empreinte carbone, de plus en plus d’armateurs utilisent la force du vent. Grain de Sail va chercher du café et du chocolat à l’autre bout du monde avec un moyen de transport unique : le voilier-cargo. Et pour les navires qui existent déjà, Beyond the sea a imaginé un système de traction par kite qui permet de réduire en moyenne de plus de 20% la consommation de carburant et les émissions de gaz à effet de serre qui vont avec.
🇫🇷 Le local
Le plus efficace reste encore de limiter les transports et choisir les alternatives locales quand elles existent. Autrement dit, on continue d’importer, dans une moindre mesure, des produits exotiques à forte valeur ajoutée comme le café et le chocolat, mais on le fait avec des bateaux qui ont le moins d’impact possible, comme ceux de Grain de Sail. Et surtout, on relocalise tout ce qui peut l’être. Donc, si on vit en France, on arrête les kiwis de Nouvelle-Zélande ou les oignons d’Italie. En mangeant des produits qui viennent d’à côté de chez nous, on limite les émissions de gaz à effet de serre, la pollution sonore, les collisions avec les mammifères marins, les pertes de conteneurs ou encore le développement d’espèces invasives. Et puis, on participe à la dynamisation de l’économie locale, on tisse des liens avec les producteurs et les productrices sur notre territoire et on accroît notre résilience alimentaire.
Mais il faut quand même nuancer tout ça et garder les ordres de grandeur en tête. Si on ne prend en compte que l’empreinte carbone, le plus important n’est pas de manger local, mais bien de manger végétal. En réalité, en moyenne, seuls 10% de l’empreinte carbone globale d’un aliment sont imputables au transport. Pour les 90% restants, ça se joue en amont ! Quand vous hésitez, mieux vaut privilégier le végétal au local, même si l’idéal reste, évidemment, d’allier le local et le végétal !
Pour aller plus loin
🎥 Film : Sonic sea
Ce documentaire produit par l’IFAW, le Fonds international pour la protection des animaux, explique comment la pollution sonore menace les animaux marins et leurs habitats. Et surtout, il montre l’importance de baisser le son pour empêcher l’extinction de certaines des plus grandes créatures de la planète.
🎙️ Podcast : “Pourquoi manger local ne sauvera pas la planète” sur L’envert du décor
Dans l’Envert du décor, les journalistes du HuffPost démêlent le vrai du faux sur les questions qui font débat pour vous aider à y voir plus clair face aux fausses bonnes idées. Dans cet épisode, ils montrent que manger local ne suffira pas pour sauver la planète.
✍️ Article : “Vegan vs. local : vous allez enfin pouvoir trancher” par Blutopia
Si vous ne comprenez pas pourquoi manger de la viande du petit producteur à côté de chez vous n’est pas forcément mieux pour la planète que des bananes qui poussent à l’autre bout du monde, cet article est pour vous.