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⏱ Temps de lecture : 3 minutes 30

« Le monde du silence ». C’est comme ça que Commandant Cousteau qualifiait l’océan. Pourtant, si vous avez déjà mis la tête sous l’eau en apnée, vous avez sans doute entendu tout un tas de bruits : les vagues qui se cassent sur le récif ou sur la plage, les poissons qui se nourrissent sur les coraux ou peut-être même le chant des baleines. Ça fait rêver, non ? Malheureusement, cette symphonie naturelle est menacée par les activités humaines.

Le problème : la pollution sonore

En seulement quelques années, on a plongé l’océan dans un vrai brouillard acoustique. Selon le projet européen Piaquo, le niveau de bruit moyen dans les mers les plus fréquentées a augmenté de près de 20 décibels sur ces 50 dernières années. Autrement dit, il y a 100 fois plus de puissance sonore, avec une portée 10 fois supérieure

En cause ? Les sonars militaires, les sondages de prospection sismique de l’industrie pétrolière et gazière, la pêche à la dynamite, l’installation et le fonctionnement d’éoliennes offshore, la fabrication de plateformes pétrolières, les forages sous-marins, le transport maritime, les navires de plaisance… Et j’en passe.

Le volume sonore ne cesse d’augmenter et touche en prime une zone géographique de plus en plus large. Dans l’eau, les sons se propagent 4 fois plus vite que dans l’air. Et avec l’acidification de l’océan, les sons voyagent sur d’encore plus longues distances. Ici, je ne parle pas de quelques dizaines de mètres, mais de centaines, voire de milliers de kilomètres.

Vous vous demandez où est le problème ? Imaginez-vous avec une chanson que vous détestez à fond dans votre casque. Au bout de quelques minutes, si ce n’est quelques secondes, vous l’enlèveriez. Dans l’océan, il y a cette chanson que vous détestez qui tourne en boucle, de plus en plus fort, mais il n’y a pas de casque. Les animaux marins n’ont pas le choix. Ils doivent vivre avec. Leurs réactions face à la pollution sonore sont variées et dépendent de l’espèce concernée, de l’intensité du bruit et de la durée d’émission. On retrouve, entre autres :

  • Des réactions physiologiques : retard de croissance, stress, augmentation du rythme respiratoire
  • Un masquage acoustique : impossibilité de communiquer, rendant la localisation entre congénères, le repérage de proies ou l’identification de prédateurs plus difficiles
  • Des réactions comportementales : fuite ou interruption de l’activité en cours, changement de trajets migratoires
  • Des dommages physiologiques temporaires : baisse du niveau d’audition, diminution de la sensibilité auditive
  • Des dommages physiologiques permanents : lésions des organes entraînant la mort de l’animal

Bref, la pollution sonore perturbe l’intégralité de la vie sous-marine et augmente même le risque de mortalité de certains individus. Le bruit sous-marin lié aux activités anthropiques a d’ailleurs été reconnu par les Nations Unies comme source de pollution marine et menace pour les écosystèmes marins en 2005.

Le bruit est pratiquement le problème le plus facile à résoudre dans l’océan.

Steve Simpson

La solution : réduire

Il y a une bonne nouvelle dans tout ça. Contrairement à la pollution plastique ou à l’acidification de l’océan liée aux émissions de gaz à effet de serre, la pollution sonore peut être réduite rapidement, et presque sans aucune séquelle.

Steve Simpson, spécialiste de biologie marine à l’université d’Exeter en Angleterre et co-signataire d’une étude sur la pollution sonore sous-marine publiée dans Science en est convaincu : “Le bruit est pratiquement le problème le plus facile à résoudre dans l’océan. On sait exactement ce qui le cause, on sait où et on sait comment y mettre fin.”

En attendant une réglementation internationale contraignante sur l’émission de bruit dans l’océan, il y a une chose que l’on peut faire en tant que citoyen·ne·s : réduire notre consommation de produits superflus et faire le choix d’acheter local lorsque c’est possible pour diminuer les flux liés au transport maritime.

En parallèle, il y a plein de solutions que les professionnel·le·s peuvent mettre en place : 

  • Réduire la vitesse des navires : diminuer de quelques nœuds la vitesse permettrait de baisser à la fois le niveau sonore, le risque de collisions avec les cétacés et les émissions de CO2
  • Réduire le bruit des hélices : utiliser des propulseurs de nouvelle génération pour les grands navires afin de limiter la cavitation de l’hélice des bateaux, c’est-à-dire la formation et l’implosion de bulles de vapeur d’eau causées par la variation de pression
  • Réduire le bruit des machines en isolant les moteurs
  • Optimiser la forme des coques pour limiter la turbulence des flux

Pour aller plus loin : regarder… et écouter

🎬 Film : Sonic Sea

60 minutes pour comprendre l’impact de la pollution sonore sur les écosystèmes marins et découvrir les solutions simples à adopter pour retrouver, un jour, un peu de calme au milieu de l’océan. Les images sont à couper le souffle et les interventions passionnantes.

📽️ Vidéo : Le cri de détresse de l’océan, Guillaume Néry

Apnéiste adepte des profondeurs, Guillaume Néry est un témoin direct de l’impact des humains sur l’océan. En collaboration avec Sea Shepherd, il a décidé de combiner plusieurs sons collectés sous l’eau pour (r)éveiller les consciences.

🗞️ Article : « La chicorée : une boisson locale pour éviter les dégâts du transport maritime » par Blutopia

Dans cet article, on explore quelques uns des impacts du transport maritime, au-delà de la pollution sonore. Et comme toujours, on présente une solution concrète : la chicorée, comme alternative au café et autres boissons du bout du monde.

Des questions, des suggestions ? J’adore vous lire, alors n’hésitez pas à m’écrire en commentaire.

Co-fondatrice & Chargée de campagnes de Blutopia

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